L’exercice des droits de la défense : obstacle suffisant à l’insaisissabilité des correspondances entre l’avocat et son client

Série compliance & contentieux

Cass. Crim 20 janvier 2021n°19-84292

Analyse

Les faits et la procédure :

Dans le cadre d’un contrôle de l’autorité de la concurrence, cette dernière avait sollicité du juge des libertés et de la détention l’autorisation de saisir de nombreux documents dans les locaux de trois entreprises appartenant au secteur de l’énergie.

Le juge des libertés et de la détention avait fait droit à la demande de l’autorité de la concurrence. Lors de ces opérations, le 22 et 23 novembre 2016, des scellés provisoires avaient été constitués.

Les opérations d’ouverture et d’expurgation des scellés provisoires s’étaient déroulées ultérieurement, du 13 au 16 décembre 2016.

Ces opérations avaient fait naître un litige entre l’autorité de la concurrence et les entreprises contrôlées.

Par suite, un recours était formé par ces entreprises tendant à obtenir l’annulation totale ou partielle des opérations de visite et de saisie qui avaient été effectuées.

Dans le cadre du recours, les entreprises objet du contrôle faisait grief à l’ordonnance d’avoir rejeté les demandes d’annulation totales ou partielles des opérations de visite et de saisies effectuées dans leurs locaux.

L’argument principal consistait à affirmer que les documents saisis étaient couverts par le secret professionnel, et étaient donc, par nature insaisissables.  Il était donc fait grief à l’autorité d’avoir refusé de restituer des pièces bénéficiant, en principe, de la protection des correspondances avocat-client.

L’ordonnance rejetant la demande des parties retenait que les pièces « ne relèvent manifestement pas de l’exercice des droits de la défense dans le présent dossier de concurrence ou dans une procédure de concurrence ».

La décision :

La haute juridiction rejette les moyens formulés par les parties, en retenant notamment que ces dernières n’avaient, délibérément, pas pris part au débat contradictoire afin d’établir le caractère protégé ou non des documents (concrètement de désigner les documents qu’elle estimait protégés à ce titre).

Toutefois, et malgré le rejet des moyens par la Cour de cassation, la juridiction rappelle que « C’est à tort que le premier président retient que seuls seraient insaisissables les documents qui relèveraient de l’exercice des droits de la défense dans le présent dossier de concurrence, alors que cette protection s’étend à l’ensemble des correspondances échangées entre un avocat et son client et liées à l’exercice des droits de la défense. »

La Cour rappelle que l’insaisissabilité des documents est étendue à l’ensemble des échanges lorsque cela a pour but l’exercice des droits de la défense.

Autrement dit, l’insaisissabilité des correspondances est de droit lorsque cela permet l’exercice des droits de la défense et ce indifféremment qu’elles concernent la procédure en cours devant l’autorité de la concurrence ou tout autre procédure de concurrence.

Thibaud Lemaitre

Thibaud Lemaitre

Associé Département Pénal des affaires / Risques graves / Compliance